19/10/2015

Un environnement complet de tests avec Docker - jour 2 (tests d'IHM)

Ce billet est le second d’une série sur la création d’un environnement de test pour des projets web. Aujourd’hui nous parlerons d’IHM, c’est-à-dire comment tester que l’interface (visuelle) de mon site n’est pas cassée sous tel ou tel navigateur.

Je rappelle que l’objectif ce ces billets / outils est de pouvoir dire “Vous n’avez pas de raison valable de ne pas tester” :)

Introduction

La question de tester une interface graphique est complexe pour plusieurs raisons :

  • manque de maturité des outils
  • complexité de comparer l’incomparable (un site avec des publicités change à chaque rafraîchissement, ce n’est pas pour autant qu’il est cassé)
  • complexité de gérer les changements de contenus (une page d’accueil avec des articles change tout le temps)
  • gérer les faux-positifs (liés, par exemple, au lissage des polices qui peuvent être différents pour un même navigateur)

Mon retour sur quelques outils de test de régression

Au fil du temps, j’ai testé pas mal d’outils de test de régression. Tous s’appuient sur des comparaisons de captures d’écrans (du site en entier, ou de blocs (divs, etc.) du site).

Navigateurs headless :

  • PhantomCss : performant, mais souvent insuffisant car basé sur un navigateur virtuel. Le rendu, même sur des sites moyennement complexes, est souvent insatisfaisant et génère de nombreux faux-positifs)
  • BackstopJs : idem

Vrais navigateurs (qui plus est ces outils ont des connecteurs vers des solutions de virtualisation externe, de type SauceLabs ou BrowserStack) :

  • Wraith : développé par le BBC, efficace mais à l’usage la sélection de blocs est assez aléatoire (voire buggée). Cet outil génère une gallerie des screenshots très très pratique. Je n’ai jamais réussi à faire fonctionner wraith-selenium correctement.
  • Huxley : développé (mais abandonné) par Facebook, complexe à utiliser (on passe son temps à patcher le code source)
  • Gemini : simple et efficace, c’est lui qui a ma préférence aujourd’hui. Permet, comme Wraith, de générer un rapport HTML

Sass :

  • ghostinspector.com/ : très joli, mais tout se fait au clickdrome avec une extension Chrome, je n’ai pas trouvé de moyen de le piloter automatiquement ou d’écrire ses propres scripts.
  • percy.io : j’aimerai bien tester, mais je n’ai pas d’invitation. Pour l’instant seul Firefox est supporté

Pour les curieux, ceux que je n’ai fait que survoler :

Installation

Nous allons donc utiliser Gemini. Voici un exemple de rapport HTML que l’on souhaite obtenir :

 Tests de non régression responsive avec Gemini

Si le site a subi des régression, les écarts seront mis en surbrillance comme suit:

 Tests de non régression responsive avec Gemini

Là encore, j’ai préparé une image Docker pour vous:

docker pull qualiboo/testing-gemini

On va s’appuyer sur le fichier docker-compose.yml que l’on a créé la dernière fois.

gemini:
  image: roukmoute/testing-gemini
  links:
    - hub
    - firefox
    - chrome
  volumes:
    - ./gemini:/var/work
hub:
  image: qualiboo/testing-hub
  ports:
    - 4444:4444
firefox:
  image: qualiboo/testing-node-firefox
  ports:
    - 5900
  links:
    - hub
chrome:
  image: qualiboo/testing-node-chrome
  ports:
    - 5900
  links:
    - hub

Vous constatez que l’on utilise Selenium, avec des noeuds Chrome et Firefox.

Vérifions l’installation. La commande suivante doit afficher la version de gemini:

docker-compose run gemini version

Premiers tests

Nous allons procéder en deux temps :

  1. faire les captures d’écrans qui serviront de référence pour les tests (gemini capture) ;
  2. comparer de nouvelles capture à ce référentiel pour voir s’il y a des régression (gemini test).

Pour cela, créez un dossier ./gemini/suite et créez-y le fichier premier-test.js avec le contenu suivant :

var gemini = require('gemini');
gemini.suite('homepage', function(suite) {
    suite
        .setUrl('/')
        .setCaptureElements('#nav-menu');
        .capture('menu');
});

Le code (JavaScript) est assez simple : on capture la div dont l’id est #nav-menu depuis la racine du site.

Maintenant, créez le fichier ./gemini/.gemini.yml qui va permettre de configurer Gemini :

rootUrl: http://qualiboo.com
gridUrl: http://hub:4444/wd/hub
browsers:
  chrome:
    desiredCapabilities:
      browserName: chrome
  firefox:
    desiredCapabilities:
      browserName: firefox

Nous indiquons ici à Gemini l’URL de base du site, les navigateurs souhaités, et comment se connecter à Selenium Grid..

Lancez la capture du référentiel (ça prend quelques secondes):

docker-compose run gemini capture

Vérifiez bien à chaque fois que vous faites une capture que les images générées (dossier ./gemini/gemini/screens) correspondent à vos attentes. Elle serviront de référentiel pour les tests. Voilà, les tests peuvent être lancés :

docker-compose run gemini test

Après quelques secondes/minutes, vous voilà avec un “beau” rapport HTML dans ./gemini/gemini-report/index.html. Il ne reste plus qu’à l’ouvrir dans votre navigateur préferé…

Tester le responsive design

Avant toute chose, il faut savoir que le monde de tests d’IHM n’est pas parfait. La version du ChromeDriver actuelle pour Linux (2.20) ne permet pas de capturer un bloc qui est plus grand que le viewport du navigateur. Si vous voulez capturer toute la page (le body), il faudra passer par Firefox.

Il est simple avec Gemini de forcer certains tests à être exécutés uniquement dans Firefox ou Chrome. Dans le fichier ./gemini/.gemini.yml ajoutez le contenu suivant:

(...)
sets:
  firefox:
    files:
     - suite/firefox-only
    browsers:
     - firefox
  chrome:
    files:
     - suite/chrome-only
    browsers:
     - chrome

Tous les tests qui seront placés dans le dosser ./gemini/suite/firefox-only seront désormais lancés uniquement par firefox (et même chose pour ./gemini/suite/chrome-only).

Comme nous souhaitons capturer la page entière (le body), plaçons notre fichier de test (./gemini/suite/premier-test.yml) dans le dossier firefox-only

Nous allons tester notre site sous des résolutions différentes ; pour cela, modifiez le fichier premier-test.yml.

Nous allons changer la résolution de l’écran avant chaque test, et cette fois nous capturons donc le body :

var gemini = require('gemini');
gemini.suite('homepage', function(suite) {
  suite
    .setUrl('/')
    .setCaptureElements('body')
    .capture('homepage', function (actions) {
        actions.setWindowSize(1200, 1024).wait(1000);
    })
    .capture('homepage tablet', function (actions) {
        actions.setWindowSize(768, 1024).wait(1000);
    })
    .capture('homepage mobile', function (actions) {
        actions.setWindowSize(320, 568).wait(1000)
    });
});

N’oubliez pas de mettre à jour le référentiel de screenshots :

docker-compose run gemini capture

A vous désormais de lancer les tests à votre guise (par exemple à chaque Push sur votre dépôt, à l’aide de Jenkins).

Aller plus loin et faire abstraction du contenu dynamique

Je l’ai évoqué, un problème récurrent des tests de régression d’IHM concerne le contenu dynamique (publicités, actualités…). Il faut trouver un moyen de faire abstraction de ce type de contenu.

Le seul moyen simple que j’ai trouvé consiste à remplacer ce contenu par du “Lorem ipsum”. Il faut alors, avant chaque test, exécuter un script JavaScript pour ce faire:

suite
    .setUrl('/')
    .setCaptureElements('body')
    .before(function(actions, find) {
        actions.executeJS(function(window) {
            // replacing images
            $('img.my-class').attr('src', '');
            
            // replacing some texts
            $('p.another-class, .title, (etc.)').html('Lorem ipsum dolor sit amet');
    
            // advertising
            $('.pub').html('PUBLICITE');
            
            // etc.
        })
    .capture(...)

Dès lors, toutes les images et contenus dynamiques sont remplacés. Il est assez simple de factoriser ce code dans un fichier à part pour le réutiliser partout.

Le contenu du site a changé, donc, oui, nos tests sont alors incomplets et éloignés de la réalité. Mais si on ne le fait pas, le risque est que ces tests ne soient jamais pertinents car fondés uniquement sur de faux-positifs. La suppression des publicités est un compromis pour être pragmatique.

Conclusion

Vous l’avez vu, vous avez là un moyen simple de tester l’IHM de votre site sous différentes résolutions, à l’aide de Docker. Si vous avez un feedback, n’hésitez pas à laisser un commentaire ; et si ce billet vous plaît, n’hésitez pas à le partager :)

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